Parce que la souffrance psychologique est terrible, elle doit être soulagée le plus vite possible. Les thérapies brèves sont multiples, mais elles ont un objectif commun : aider un sujet à retrouver, de lui-même, sa liberté, dans un délai le plus court possible. Enquête.
6 clés pour : Faire une bonne thérapie
1. Une thérapie sur mesure.
Le prêt à porter n’existe pas en thérapie. Le but de la thérapie, c’est de rencontrer les besoins de chaque patient : chaque fois une surprise, chaque fois la découverte d’une terre inconnue. Dans sa pratique quotidienne, chaque thérapeute intègre des éléments de chacun des modèles : hypnose, EMDR, PNL… Il le fait dans des proportions qui varient suivant chaque patient et surtout, il y met la patte de sa créativité personnelle.
2. Avoir un objectif précis.
Le thérapeute ne s’engage pas dans une thérapie à l’aveuglette, sur de seules et vagues manifestations d’angoisse. Il demande au patient de préciser ce qu’il veut changer : ce sera l’objet de la thérapie. Du marais de son angoisse, il doit être capable d’énoncer une plainte principale qui sera l’axe du traitement bref. Cela doit être résumé en une phrase, et décrit en termes concrets et vérifiables par la personne et par ses proches. Cette définition du but, avec le soin permanent de savoir où en est la thérapie, est une constante de nombreuses thérapies brèves.
3. Ce n’est pas le pourquoi qui compte.
La complexité de l’inconscient et la pauvreté de moyens du conscient sont telles qu’il vaut mieux laisser l’inconscient défaire ce qu’il a fait, en lui fournissant juste le contexte pour cela. Et tant pis si nous ne comprenons pas pourquoi le patient va mieux ! Ce que le psychisme a fait (le symptôme), il peut le défaire pourvu qu’on lui en donne l’occasion. Peu importe si l’on ne sait pas ce qui se passe dans l’inconscient. Créons le contexte dans lequel l’inconscient pourra procéder aux réaménagements nécessaires. La recherche du pourquoi n’est ni nécessaire ni suffisante pour changer. Les thérapies brèves cherchent à activer les ressources de la personne pour qu’elle sorte de son engluement pathologique. Elle les a mais ne le sait pas. On l’aide à les découvrir.
4. Coopération patient-thérapeute.
Je suis émerveillé devant la créativité des patients dès lors qu’on la laisse s’exprimer. Dès qu’ils voient que le thérapeute ne se considère pas comme un expert qui sait mieux qu’eux ce qu’ils ont, dès qu’ils voient que ce thérapeute les considère, eux, comme les véritables experts de leurs troubles, alors la coopération s’installe, toutes leurs capacités se mettent en branle, avec un résultat souvent rapide à la clef.
5. Des thérapies les plus courtes possibles.
Longueur de temps n’est pas synonyme de plus grande profondeur ni de plus grande efficacité. On peut travailler profondément en temps bref. Une thérapie longue devient facilement une routine inefficace. Ce qui compte, c’est que patient et thérapeute restent actifs tout au long de la thérapie. Actuellement, la tendance majeure en thérapie est au raccourcissement de la durée de celle-ci.
6. Guérison par contamination.
Quand un changement survient dans un secteur de la vie de l’individu, il contamine les autres. Il est inutile de se préoccuper de tous les domaines troublés. Un seul suffit pour qu’on puisse y entrer. Cette expérience entièrement nouvelle pour les patients a un effet boule de neige dans d’autres domaines de l’existence.
Dominique Megglé
Médecin psychiatre, membre titulaire de la Société médico-psychologique, président de l’Institut Milton H. Erickson Méditerranée de Toulon-Marseille. Après avoir travaillé en milieu hospitalier en Côte-d’Ivoire et en France, il exerce en libéral à Toulon depuis 1997.
LEXIQUE
Un insight : C’est, chez le patient, une illumination aussi bien intellectuelle qu’émotionnelle, conviction profonde et nette d’avoir pleinement compris l’origine du trouble. La résolution du problème provoque des sentiments de satisfaction et de libération. L’homme est libéré d’un conflit, parce qu’il en a compris les causes, et il a le sentiment de la véracité de cette libération.
« Ses jambes se dérobaient sous lui » Un de mes patients avait une phobie des endroits élevés : hauts d’escaliers, ponts, passages escarpés… Immersion dans l’angoisse.
TÉMOIGNAGE
Il était allé sur la digue de Cherbourg. Liquéfié par l’angoisse, il n’avait pas pu faire un pas. Ses jambes se dérobaient sous lui. Rentré précipitamment chez lui, il ne s’était pas résolu à sa défaite. Il était retourné aussitôt sur la digue pour se vaincre. Dans une course effrénée, il avait fait l’aller et retour jusqu’au bout en dix minutes. Haletant et suant, il avait vaincu ! Mais il était définitivement convaincu que marcher sur une digue était pour lui une tâche héroïque. Il était plus phobique que jamais ; en fait, il avait perdu. Pourtant le traitement était le bon mais il n’avait pas duré assez longtemps. Mon patient n’avait eu que le temps de voir monter son angoisse. Je le lui ai expliqué et l’ai renvoyé dans la journée sur la digue. Les vingt premières minutes avaient été difficiles ; des passants se demandaient ce que faisait ce type qui avait une raideur d’automate ; puis ses muscles ont retrouvé leur force et son brouillard mental s’est dissipé ; il a pris beaucoup de plaisir à respirer l’air de la mer, à voir voguer les car-ferries vers l’Angleterre, seul au bout de la digue, sans rambarde ; enfin, il s’est ennuyé et ne sachant plus quoi faire, là-bas, au-dessus de la mer, il s’est souvenu qu’il avait dans la main l’album de Gaston Lagaffe que je lui avais demandé d’emporter avec lui, et l’a lu, assis au bord de la digue, les jambes dans le vide !
Pour aller plus loin :
Les thérapies brèves, Dominique Megglé, Satas, 2011
Douze conférences sur l’hypnose, la thérapie brève et les sangliers, D. Megglé, Satas, 2011
Des ressources pour guérir, Pascal Ide, DDB, 2012
Institut Erickson Méditerranée : www.laferrane.com